Analyse critique de la vision européenne de l'histoire des sciences selon Dominique Lecourt
Hamdi Mlika  1  
1 : Université de Kairouan

Dans cet exposé, j'essaierai tout d'abord de mettre au clair le rapport entre science et philosophie selon Dominique Lecourt, pour ensuite m'intéresser à sa vision qu'il appelle européenne de la science moderne et de son histoire. Je me référerai notamment à un grand colloque qu'il avait lui-même organisé à Paris en décembre 1994 et dont les actes ne seront publiés qu'en 1998 par les éditions de la Commission européenne, ayant pour thème : Science, philosophie et histoire des sciences en Europe. Je pense que cette conception défendue par le regretté D. Lecourt n'arrive pas, selon mon point de vue et malgré le pluralisme des interventions lors de ce colloque, à se détacher réellement, d'une certaine conception idéologique occident-centrée de la science, ce qui affecte en profondeur la nature de sa compréhension de l'histoire des sciences et de ses vertus épistémologiques et philosophiques. Nous pouvons même déceler au sein de cette conception une sorte d'inconsistance interne, car la science en Europe, dans son versant moderne à partir de Galilée, ne peut être séparée de la science arabe classique. La science telle qu'elle s'est développée en Islam, bercée par la langue arabe, est l'une des racines de la science moderne en Europe. Je discuterai les traits de cette conception dite européenne de la science, en me posant quelques questions autour de ses traits distinctifs et de son rapport aux autres contributions et visions que nous cernons dans d'autres cultures et d'autres sociétés. Je plaiderai à la fin de mon exposé pour un concept de la science européenne et de son histoire plus ouverte qui ira jusqu'à la décentraliser et lui donner un ancrage historique commun à toutes les cultures et sociétés du monde. Toute vision de l'histoire des sciences implique un engagement d'ordre philosophique qui doit militer pour une meilleure valorisation des apports des peuples, des cultures et des communautés linguistiques de l'humanité tout entière. À la conception proposée par Dominique Lecourt, j'opposerai une conception de la science dite générique. Ce qualificatif est directement tiré de l'épistémologie générique d'Anne-Françoise Schmid qui déploie, à mon sens, une autre vision de la science en Europe qui serait plus adéquate, notamment dans ces termes philosophiques, avec l'état actuel des pratiques scientifiques et des valeurs qui peuvent être construites à partir d'elles pour sortir de la crise qui est en vérité mondiale.



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